Le chimiste anglais John Dalton s’est inspiré de la philosophie atomiste grecque pour créer une théorie atomique moderne, dans laquelle les éléments se composent d’atomes ayant une masse atomique déterminée. Sa théorie permit de comprendre les grands phénomènes chimiques observés en son temps.

L’EXISTENCE DES ATOMES

L’idée que la matière puisse être discontinue, donc constituée de vide et de structures infiniment petites, remonte à l’Antiquité grecque. Les philosophes du ve siècle av. J.-C. Leucippe et son élève Démocrite sont considérés comme les fondateurs de l’atomisme (du grec atomos, c’est-à-dire « insécable »). Cette doctrine philosophique sera reprise à différentes époques. Galilée ou Newton admettent l’existence de particules de matière, sans forcément être atomistes. Lorsque naît la chimie moderne, l’idée de l’existence des atomes a fait son chemin. Les chimistes sont désormais en mesure de réaliser des mesures précises dans leurs laboratoires. Ils observent un certain nombre de proportions constantes entre réactifs et produits: un gramme d’hydrogène et huit grammes d’oxygène forment toujours neuf grammes d’eau, par exemple. En 1789, William Higgins mentionne des particules « ultimes ». Mais c’est l’anglais John Dalton (1766-1844) qui va élaborer une véritable théorie atomique.

DE LA MÉTÉOROLOGIE À LA CHIMIE

Les travaux en météorologie de Dalton l’ont amené à étudier les gaz et la chimie en général. En 1803, il donne une conférence à la Literary and Philosophical Society de Manchester sur les lois qu’il a découvertes. Il reprend l’idée grecque des atomes, jusqu’ici délaissée. Il explique que les éléments sont composés d’atomes, trop petits pour pouvoir être observés, et caractérisés par une masse bien définie: la masse atomique. Les atomes de masses différentes se combinent selon des proportions simples. Dalton propose un premier tableau, préfigurant le tableau périodique des éléments actuels, comportant six éléments avec leur masse atomique: hydrogène, carbone, azote, oxygène, phosphore et soufre. Il ne pense pas pouvoir mesurer directement cette masse, mais les proportions constantes observées dans les expériences permettent d’établir des masses relatives. Dalton exposera sa théorie atomique dans son Nouveau Système de philosophie chimique, publié entre 1808 et 1827.

MASSE ATOMIQUE, CORPS PURS ET MÉLANGE

L’intuition de Dalton est un coup de génie qui va révolutionner la chimie. Sa théorie offre en effet un cadre explicatif aux résultats quantitatifs des travaux de ses contemporains. Une des lois fondamentales de la chimie, la loi des proportions définies, trouvait ainsi une explication. C’est le chimiste français Joseph Louis Proust (1754-1826) qui avait formalisé cette loi au cours d’un long débat avec un autre chimiste, Berthollet, en donnant une première expression en 1794.
Après de très nombreuses analyses de composés inorganiques, Proust avait établi un critère expérimental pour distinguer les corps purs des mélanges, l’invariabilité de leur composition élémentaire quantitative: les proportions des composants d’une combinaison chimique donnée étaient déterminées et ne variaient pas. Proust signait ainsi l’acte de naissance de l’espèce chimique et fournissait à Dalton une piste qui allait le mener à la notion d’une masse atomique caractéristique de chaque élément.

LA LOI DE LA CONSERVATION

La théorie atomique de Dalton permettait aussi d’expliquer la loi de la conservation de la masse formulée en 1789 par Antoine Lavoisier (1743-1794). Lavoisier énonçait que la masse totale d’une réaction chimique reste constante. Dalton en conclut que les atomes étaient indivisibles et ne pouvaient être ni créés ni détruits, donc que la matière était fondamentalement indestructible. Dalton lui-même énonça une loi capitale, la loi des proportions multiples: si deux éléments peuvent se combiner pour former plusieurs substances différentes, ils le font selon un rapport simple (de nombres entiers: de là 2, ou de là 3 par exemple). Il arriva à ce résultat en travaillant sur l’analyse quantitative du gaz des marais et du gaz oléifiant, tous deux des composés binaires d’hydrogène et de carbone. Dalton montra que pour une même quantité d’hydrogène, il y avait exactement le double de carbone dans le gaz oléifiant que dans le gaz des marais, soit un rapport simple de 1 à 2.

DE L’ATOME À LA MOLÉCULE

Dalton est aujourd’hui considéré comme le père de la théorie atomique, même si sa théorie était perfectible. Il n’avait pas saisi que les atomes de certains éléments pouvaient exister à l’état de molécules (par exemple le dioxygène: O2). Il pensait aussi que les composés les plus simples ne comportaient qu’un atome de chaque élément. Par ailleurs, ses calculs des masses atomiques, peu précis, s’avérèrent assez éloignés de la réalité. Sa théorie ne fut pas unanimement acceptée, ses adversaires lui reprochant son caractère spéculatif. Mais elle expliquait la plupart de leurs résultats et les chimistes finirent vite par comprendre que Dalton avait touché juste et par reconnaître sa théorie. Un siècle après, en 1908, Jean Perrin (1870-1942) démontra définitivement l’existence des atomes. Mais à cette date, ceux-ci n’étaient plus considérés comme les particules fondamentales de la matière, ainsi qu’on le pensait à l’époque de Dalton: l’ère de la physique subatomique avait déjà débuté.

À RETENIR

Selon la théorie atomique, la matière est composée d’unités discrètes appelées atomes. Cette idée grecque fut reprise par le chimiste anglais John Dalton (1766-1844), qui développa en 1803 une théorie atomique moderne selon laquelle chaque élément était composé d’atomes indestructibles caractérisés par une masse atomique et pouvant se combiner en structures complexes. Cette théorie fournissait un cadre explicatif aux principaux phénomènes chimiques (loi de conservation de la masse, loi des proportions définies, loi des proportions multiples).