De nombreux phénomènes dans la nature semblent régis par le hasard, comme le lancer d’une pièce de monnaie. Il peut paraître impossible de dire quoi que ce soit sur le résultat d’une telle expérience aléatoire. Il existe pourtant des lois du hasard. La théorie des probabilités les étudie.

EXPÉRIENCES ALÉATOIRES

La théorie des probabilités fournit des modèles mathématiques permettant l’étude d’expériences dont le résultat ne peut être prévu avec une totale certitude. Une telle expérience est appelée « expérience aléatoire », et c’est la brique élémentaire de la théorie des probabilités. Cette théorie est donc l’exact opposé d’un modèle déterministe qui nous permet, une fois les conditions initiales connues, de prévoir exactement le résultat que l’on obtiendra. L’exemple le plus classique d’une expérience dont l’issue est incertaine est le lancer d’un dé. Le résultat d’une telle expérience sera un entier compris entre 1 et 6, mais on ne peut absolument pas savoir à l’avance quel nombre va sortir. Beaucoup de situations réelles suivent ce modèle: le lancer d’une pièce de monnaie, le mélange de deux gaz, le tirage d’une boule dans une urne en contenant plusieurs, etc.
Toutefois, il existe bel et bien des lois qui régissent le monde de l’aléa. La théorie des probabilités est l’étude de ces lois.

DÉFINIR PRÉCISÉMENT L’UNIVERS DES ALÉAS

À partir de la notion d’expérience aléatoire, on définit le concept de base de la théorie des probabilités, un événement. Pour une expérience aléatoire donnée, l’ensemble de tous les résultats possibles, appelés « événements élémentaires », est appelé l’« univers de l’expérience ». La détermination de l’univers d’une expérience est la première chose à faire, ce qui n’est pas toujours simple. Dans le cas d’un lancer de dé, cela peut sembler évident: l’ensemble des événements élémentaires sera « {obtenir pile, obtenir face} ». Il n’y en a ici pas d’autres. Mais on sent bien que, dans des situations plus compliquées, il peut se révéler difficile de définir précisément cet univers. Une fois posé l’univers de l’expérience, on définit un événement comme un sous-ensemble de cet univers. Les contraintes fixées sur l’expérience définiront ce sous-ensemble. Ainsi, dans un lancer de dé, dire que l’on veut obtenir un nombre pair définira l’événement {2, 4, 6}, sous-ensemble de l’univers {1, 2, 3, 4, 5, 6}.

LA FAMILLE DES ÉVÉNEMENTS RÉALISABLES

Une fois définies les notions d’expérience aléatoire et d’événement, on peut donner la définition de la « probabilité » d’un événement. C’est une fonction qui, à un événement, associe un nombre entre 0 et 1. Il n’est pas toujours possible d’attribuer de manière cohérente une probabilité à chaque partie de l’univers, si bien qu’elle sera définie sur un domaine plus petit que l’ensemble des parties de l’univers. Ce domaine s’appelle la « famille des événements réalisables ». On y définit la probabilité par deux propriétés: la
probabilité de l’univers tout entier vaut 1, et la probabilité d’une union disjointe d’événements est égale à la somme des probabilités de ces événements. En fait, définir une probabilité consiste à affecter une « masse » à chaque événement observable, avec une masse totale égale à 1. De cette définition de base, on peut tirer beaucoup de propriétés d’une probabilité, comme le fait que la probabilité d’un événement impossible vaut 0, ou comme la probabilité de l’union de deux événements.

LA VARIABLE ALÉATOIRE RÉELLE

La donnée du triplet constitué d’un univers, d’une famille d’événements réalisables et d’une probabilité constitue ce que l’on appelle un « espace probabilisé ». Sur un tel espace, on peut définir un concept fondamental en théorie des probabilités, une variable aléatoire. C’est une application de l’univers dans les réels (on parle alors de « variable aléatoire réelle ») qui vérifie deux conditions: d’une part, l’ensemble des images est une partie au plus dénombrable, et d’autre part, pour tout élément de l’ensemble des images, son image réciproque appartient à la famille des événements réalisables. Une telle application est dite « mesurable ». Il est alors possible de définir une loi de probabilité de la variable aléatoire en transportant la probabilité initiale. Certaines lois de probabilité pour les variables aléatoires sont d’un usage courant: loi de Bernoulli, loi uniforme, loi binomiale (tirage avec remise), loi hypergéométrique (tirage sans remise), lois géométriques ou bien loi de Poisson.

TRIBU ET MESURE DE PROBABILITÉS

Même si les calculs de probabilité dans des problèmes liés au hasard sont fort anciens, ce n’est qu’au début du xxe siècle que la théorie des probabilités trouve son cadre formel, axiomatisé par Andreï Kolmogorov. Il utilise la théorie de la mesure initiée quelques années plus tôt par Borel et Lebesgue. Après Kolmogorov, la théorie des probabilités et la théorie de la mesure sont si liées l’une à l’autre que certains estiment que c’est une seule théorie. C’est donc dans le cadre de la théorie de la mesure que Kolmogorov réécrit toute la théorie des probabilités. Ainsi, l’espace probabilisé sera défini à partir des notions de tribu (un ensemble de parties d’un ensemble, non vide, stable par complémentarité et par union dénombrable) et de mesure de probabilité (application d’une tribu vers les réels positifs telle que l’image de l’ensemble vide soit 0 et vérifiant une propriété appelée la « sigma-additivité »). À partir de là, toute la théorie des probabilités s’exprimera en termes de mesure.

À RETENIR

La théorie des probabilités étudie les lois qui régissent le hasard et vise à les modéliser afin de fournir des informations sur les résultats d’expériences aléatoires. Les notions de base sont les expériences aléatoires, les événements, la probabilité d’un événement et le concept de « variable aléatoire ». Si les calculs de probabilité existent depuis fort longtemps, ce n’est qu’au début du xxe siècle qu’ils furent axiomatisés via la théorie de la mesure, née quelques années plus tôt.