Les mathématiques tropicales sont une branche récente des mathématiques. Elle trouve son origine dans la recherche en informatique. En adoptant de nouvelles définitions pour l’addition et la multiplication sur l’ensemble des réels, il est possible de définir une grande variété d’objets tropicaux.
Les mathématiques tropicales sont dénommées ainsi en l’honneur de leur inventeur, le Brésilien Imre Simon.

ORIGINE

Les mathématiques tropicales ont été ainsi nommées en l’honneur des travaux à l’origine du développement de cette branche des mathématiques, travaux initiés par l’informaticien brésilien Imre Simon. Il s’agit ici de considérer l’ensemble des nombres réels, DS. Cet ensemble, muni de deux lois internes (une addition et une multiplication), répond à certaines propriétés (distributivité, existence d’un élément neutre, etc.) qui en font ce que l’on appelle un corps. Cette structure de corps rend l’ensemble des réels particulièrement utile. Toutefois, il est possible de considérer toujours l’ensemble des réels, mais de le munir cette fois de deux lois internes différentes de l’addition et la multiplication usuelles. L’idée formelle des structures utilisant min et max (c’est-à-dire le minimum ou le maximum de deux nombres) comme loi interne de la structure est relativement récente et fut motivée par ses applications en théorie des graphes, en théorie des langages ou en automatique discrète.

OPÉRATIONS TROPICALES

On considère l’ensemble des nombres réels. On le munit de deux lois internes, notées ® et O, définies de la manière suivante: pour tous nombres a et b dans DS, a ® b = max{o,b} et a O b = a + b. Les opérations ® et O s’appellent respectivement addition tropicale et multiplication tropicale. L’ensemble des réels muni de ces deux opérations n’est cette fois plus un corps, car il ne respecte plus certaines propriétés des corps, comme l’existence d’un élément neutre. En effet, l’opération © ne possède pas d’élément neutre. En fait, l’ensemble des réels muni de ces deux lois internes est un semi-corps (car il respecte tout de même certaines propriétés des corps), appelé semi-corps tropical. Au sein de ce semi-corps, il est alors possible d’additionner des nombres réels, de les multiplier, de les diviser mais pas de soustraire. Afin de retrouver une structure de corps, il faut ajouter un élément neutre pour l’addition tropicale, appelé le zéro tropical (on peut facilement démontrer que cet élément neutre est -<»).

DROITES TROPICALES

Le changement des lois internes sur l’ensemble des réels a des conséquences surprenantes. Une droite, dans le plan, est définie par un polynôme de deux variables de degré 1. D’une manière quelque peu différente, mais dont les propriétés sont assez proches de celle d’une droite du plan, on peut définir des droites tropicales. Elles sont constituées d’un point origine et de trois demi-droites partant de ce point. C’est donc un tripode, c’est-à-dire un
objet à trois pieds. La direction des trois demi- droites étant parfaitement définie à partir du point origine, une droite tropicale est unique, à l’image d’une droite du plan. On retrouve alors de nombreuses propriétés des droites habituelles, telles que la possibilité de tracer une droite tropicale étant donnés deux points quelconques du plan. Cette droite tropicale serait de plus unique si les deux points ne se trouvaient pas sur une même droite, prolongement de l’une des demi-droites formant la droite tropicale.

POLYNÔMES TROPICAUX

En remplaçant la notion de parallélisme par l’indépendance des points (qui assure l’unicité d’une droite tropicale), il est alors possible de démontrer des propriétés telles que le fait que deux droites tropicales dont les points origines sont indépendants ne se coupent jamais, pendant tropical de la propriété selon laquelle, dans le plan, deux droites parallèles ne se coupent jamais. Si l’on se souvient qu’une droite habituelle est définie comme l’ensemble des solutions d’une équation du type ax + by + c = 0, où ax + by + c est un polynôme de degré 1 à deux variables, on peut alors se demander si l’on peut, de la même manière, définir une droite tropicale comme l’ensemble des solutions d’une équation comportant un polynôme tropical. La réponse est oui. Il suffit de considérer un polynôme de degré 1 à deux variables de la forme ax + by + c mais où les coefficients a, b etc sont des nombres tropicaux. On peut montrer alors que l’ensemble des solutions est bien une droite tropicale.

COURBES TROPICALES

De manière générale, on peut définir des polynômes tropicaux de degré quelconque et obtenir ainsi de nombreuses courbes tropicales dans le plan. Les chercheurs ont montré que ces courbes tropicales sont en fait des réunions finies de demi-droites et de segments. La question qui se pose alors est de savoir s’il existe une relation entre les courbes algébriques complexes habituelles (définies par un polynôme à coefficients complexes dans le plan complexe) et les courbes tropicales. En définissant l’amibe d’une courbe (l’image de la courbe par une certaine fonction), qui est un objet mathématique plus facile à visualiser, on peut montrer que toute courbe tropicale est la limite d’une suite d’amibes de courbes algébriques complexes. Ce résultat très fort est à l’origine du développement de nombreux théorèmes de correspondances, notamment en géométrie énumérative, branche de la géométrie qui s’intéresse au dénombrement d’objets géométriques tels que les courbes algébriques.

À RETENIR

Les mathématiques tropicales trouvent leur origine dans la recherche en informatique théorique. C’est en l’honneur de l’un de ses initiateurs, le brésilien Imre Simon, que l’adjectif « tropical » fut introduit. L’idée est de munir l’ensemble des réels de lois internes différentes de celles que l’on utilise usuellement. Il est alors possible de construire des objets étranges: des nombres tropicaux, des droites tropicales, des polynômes tropicaux, des courbes tropicales, bref une véritable géométrie tropicale dont les applications sont riches.