Tous les jours, nous prenons des décisions influençant le cours de notre vie. Cependant, contrairement à ce que l’on peut penser, nous ne sommes pas toujours maîtres de celles-ci, car certains processus mentaux nous empêchent parfois de prendre « objectivement » les meilleures décisions.

LE FONCTIONNEMENT DE NOTRE CERVEAU

Pour comprendre comment nous prenons nos décisions, il faut d’abord comprendre comment notre cerveau fonctionne. Ce qu’il faut savoir, c’est que notre cerveau, s’il ne représente que 2 % environ de notre masse corporelle, accapare plus de 20 % de notre énergie. Extrêmement gourmand en ressources, il doit les économiser au maximum. Pour cela, la nature a mis en place un procédé très ingénieux. Notre cerveau fonctionne selon deux systèmes. Le premier est intuitif, rapide: il réagit automatiquement à l’environnement et prend des décisions simples, faciles et souvent conditionnées par le passé, par les habitudes. Le deuxième système est lent, fastidieux, conscient: il analyse les données, réfléchit, compare, évalue. Cependant, il privilégie la voie de la facilité et sauf contrordre ou situation sortant de l’ordinaire et demandant plus d’attention, il entérine en général les décisions prises par le système 1, c’est-à-dire celui qui prend des décisions intuitives.
2% SEULEMENT DE CHOIX VRAIMENT RÉFLÉCHIS!
Certains psychologues pensent que plus de 98 % des décisions que nous prenons au quotidien se font sans vraiment en prendre conscience. Nous répondons en général aux sollicitations de notre environnement de manière automatique: nos comportements sont davantage issus de schémas de comportements appris ou instinctifs que d’une réflexion poussée. Réfléchissons un peu à notre quotidien: nous nous levons, nous préparons, mettons nos chaussures, amenons notre enfant à l’école, conduisons la voiture, etc. Tout cela se fait sans vraiment y réfléchir. On peut même aller plus loin et parler du travail: quand nous allons voir nos mails au fur et à mesure qu’ils arrivent au lieu de grouper leur lecture sur des plages de temps précises et de consacrer notre temps aux dossiers vraiment importants… Nous n’y réfléchissons pas vraiment. On se laisse porter par l’environnement, les outils de communication et la propension naturelle à réagir immédiatement aux stimuli.
LES BIAIS COGNITIFS
Les autres facteurs qui nous empêchent de « réfléchir » de manière objective et rationnelle s’appellent les « biais cognitifs ». Ces biais sont de toutes sortes et leur principal avantage (et fonction) est qu’ils permettent à notre cerveau d’économiser encore plus d’énergie. Nous avons tendance à respecter nos engagements, c’est-à-dire nos décisions antérieures, surtout quand ces décisions ont été très coûteuses en temps et en énergie. Cela
nous sert 90 % du temps, mais quelquefois, cela nous dessert aussi. C’est ce que l’on appelle les pièges abscons. Par exemple, c’est le cas du joueur qui va investir à perte en pensant que chaque mise va lui permettre de « se refaire ». S’il pensait rationnellement, il verrait bien que les risques de perdre plus d’argent sont énormes, mais il a déjà tellement dépensé qu’arrêter tout de suite lui paraît impossible (c’est ce que l’on appelle l’aversion de la perte). Il se laisse porter par son « instinct » et continue à se ruiner.
LA NORME SOCIALE
Nous sommes des êtres grégaires. L’influence du groupe sur chacun de nous est bien plus grande que nous le pensons: nous oscillons en fait tout le temps entre notre besoin de conformité et notre besoin de différenciation. Le tatouage, par exemple, comble notre besoin de différenciation car notre corps devient « unique ». Mais il satisfait également notre besoin de conformité parce que nous rentrons alors dans un groupe social (les tatoués) que nous considérons comme « cool ». Nous sommes soumis ainsi à de nombreux codes, qui diffèrent selon les groupes d’appartenance dans lesquels on évolue. Ces codes sont très puissants et y déroger est très coûteux et difficile. Certains facteurs, comme le manque de confiance en soi (même momentané), renforcent le pouvoir des normes: c’est le cas quand vous commencez un nouveau travail et que, pour vous intégrer, vous avez tendance à « copier » le comportement de vos nouveaux collègues (tenue vestimentaire, horaires de repas, façon de parler, etc.).
ALORS, COMMENT DÉCIDER EN TOUTE CONSCIENCE?
Premièrement, nous avons vu que la prise de décisions est coûteuse en énergie. Quand nous sommes fatigués, nous réfléchissons moins et soit nous prenons moins de décisions, soit nous prenons davantage de décisions automatiques. Il est préférable d’y réfléchir à froid (le matin) plutôt qu’à chaud (le soir après le travail). Il vaut mieux traiter ses dossiers complexes le matin plutôt que le soir. Ensuite, il est très difficile de se défaire de nos biais cognitifs, car nous pensons ainsi depuis des millénaires. Cependant, une chose est sûre: on conseille en général les autres mieux que nous-mêmes. Quand vous devez prendre une décision, demandez-vous deux choses: « Si mon meilleur ami était dans cette situation, que lui conseillerais-je ? et ensuite si je devais prendre cette décision sans me référer à celles que j’ai déjà prises avant, que ferais-je ? ». Vous cesserez enfin de calquer votre comportement sur celui des autres et vous affirmerez votre personnalité et votre originalité.
À RETENIR
• Notre cerveau est comme une grosse voiture: il engloutit beaucoup de carburant. Du coup, il se met souvent sur « pilote automatique » pour l’économiser: il reproduit des schémas comportementaux et réagit de manière instinctive aux demandes de l’environnement. Ce fonctionnement ne garantit malheureusement pas une prise de décisions éclairée. Pour réfléchir dans les meilleures conditions, il faut le faire de préférence quand on est en forme et en prenant du recul face à nos préjugés, nos décisions antérieures et notre groupe social.