L’analyse d’un signal à l’aide de la transformation de Fourier fournit
des informations fréquentielles sur le signal mais rien du point de vue temporel. Plusieurs méthodes ont été mises en place afin de pallier cette lacune, la plus puissante d’entre elles étant à ce jour la théorie des ondelettes.

INSUFFISANCE DE LA TRANSFORMATION DE FOURIER

Dès que l’on cherche à étudier un signal, c’est-à-dire à vouloir le décrire le plus précisément possible, on pense naturellement à le décomposer selon des éléments plus simples à étudier. Et donc, on pense au travail de Fourier. Un signal, objet mathématique que l’on retrouve dans un nombre incroyable de domaines scientifiques, peut être représenté par la donnée de son amplitude en fonction du temps. Si l’on s’intéresse aux fréquences du signal, on étudiera alors le spectre des fréquences. Lorsque le signal est stationnaire, le spectre des fréquences est constant. Mais si le spectre dépend du temps, le signal est dit non stationnaire. Si la transformation de Fourier fonctionne très bien pour les signaux stationnaires, elle ne s’adapte malheureusement pas aux signaux non stationnaires. En effet, le calcul de la transformée de Fourier d’un signal ne fournit aucune information temporelle sur la structure du signal. C’est pour pallier cette lacune que la théorie des ondelettes est née.

L’ANALOGIE MUSICALE

Il est classique de considérer l’analogie musicale afin de comprendre les deux aspects de ce que l’on appellera l’ana¬ lyse temps-fréquence, dans laquelle se situe la théorie des ondelettes. On considère un morceau de musique représenté par une fonction. Le morceau de musique est constitué de notes de musique, caractérisées par une hauteur et une durée données et par le fait qu’elle apparaît à un instant donné. La représentation temporelle de la fonction représentant le morceau de musique permettra de lire la localisation temporelle du signal (ici on entend un son, là un autre) sans pouvoir fournir d’informations sur la hauteur du son par exemple. D’un autre côté, la représentation fréquentielle permet d’affirmer que le morceau de musique contient un la ou un si (avec la hauteur du son) mais ne permet pas de dire quand ces notes sont jouées ni si elles le sont de manière rapide ou lente. Pour obtenir une analyse complète, il faut donc avoir recours à l’analyse temps-fréquence.

LA THÉORIE DES ONDELETTES

Au milieu des années 1940, le physicien D.Gabor a une idée afin de remédier aux lacunes de la transformée de Fourier. Il propose de rendre locale l’analyse de Fourier, dans une fenêtre, puis de faire glisser la fenêtre le long du signal. Une fenêtre est une fonction régulière qui varie lentement et qui est parfaitement localisée, dans la mesure où elle est nulle en dehors de son support (la fenêtre de Gauss par exemple). En multipliant (on effectue un produit de convolution) la fonction à étudier avec la fenêtre, on obtient alors une version locale de la fonction à laquelle on peut appliquer la transformation de Fourier. Ainsi, en plus d’obtenir l’analyse Séquentielle, on reconstruit petit à petit l’analyse temporelle. L’ensemble des transformées de Fourier locales forme la transformée de Gabor du signal et fournit donc une analyse Séquentielle locale du signal. Ce type de transformée a pu s’appliquer dans de nombreux domaines, comme celui de l’étude des signaux audiophoniques.

LES ONDELETTES

Si la transformée de Gabor a trouvé de nombreuses applications et fonctionne plutôt bien, elle possède toutefois une sérieuse limite, connue sous le nom des inégalités de Heisen- berg. L’idée est que l’on ne peut pas être précis à la fois en fréquence et en temps. Il faut donc choisir l’analyse que l’on souhaite précise, ce qui fixera le degré de précision de l’autre. Afin de pallier ce nouveau défaut, le géophysicien français Jean Morlet va conceptualiser, pour l’analyse de signaux sismiques, une idée déjà ancienne sous le nom d’ondelettes. Une ondelette est une petite onde (ou petite vague) qui possède un début et une fin. L’idée de Morlet est de s’intéresser non plus au concept de fréquence mais à celui d’échelle. Il choisit alors de représenter une fonction, ou un signal, comme une somme pondérée de ces petites ondes translatées ou dilatées. Cette somme est la transformée en ondelettes du signal et les poids de ces ondelettes dans la décomposition sont les coefficients d’ondelettes.

FORCE DES ONDELETTES

Depuis les travaux de Morlet, de nombreux mathématiciens ont affiné la théorie des ondelettes, les ondelettes de Haar ou les ondelettes de Daubechies par exemple. Si cette théorie a connu, et connaît encore, un fort développement, c’est sans nul doute parce qu’elle possède de très nombreuses applications. On peut par exemple citer le débruitage ou le tatouage d’images. Les images obtenues par les différentes techniques d’acquisition sont souvent très bruitées. La théorie des ondelettes permet, en ne conservant que certains coefficients d’ondelettes, de retrouver l’image originale au sein du bruit. Dans le cas du tatouage d’image (insertion d’une marque dans une image afin d’en assurer l’authenticité), on calcule la transformée en ondelettes de l’image et celle de la marque. On ajoute ensuite les coefficients d’ondelettes de l’une et de l’autre en tous les points où l’importance visuelle est la plus forte. Cette méthode reste robuste face à tous les algorithmes de traitement d’images.

EN RÉSUMÉ

L’étude d’un signal a été conceptualisée par Fourier avec sa technique de décomposition selon les séries de Fourier ou la transformée de Fourier. Malheureusement, cette transformation, si elle fournit de précieuses informations fréquentielles, ne dit rien sur l’aspect temporel. C’est pour pallier cette lacune que d’autres théories ont vu le jour, comme la transformée de Fourier à fenêtre glissante. Mais c’est la théorie des ondelettes qui a le mieux répondu à cette question, permettant une rigoureuse analyse temps-fréquence d’un signal.