Le triangle de Pascal, connu bien avant la formalisation rigoureuse énoncée par Blaise Pascal en 1654, est un outil omniprésent dans l’ensemble des domaines des mathématiques. Possédant de très nombreuses propriétés plus ou moins mystérieuses, il n’a sans doute pas fini de nous surprendre.

UN TRIANGLE OMNIPRÉSENT

L’histoire du triangle de Pascal remonte en réalité à des périodes bien antérieures au travail de Pascal. On en trouve des utilisations dans les mathématiques orientales ou chinoises des siècles auparavant ou bien en Europe des années avant la formalisation de Pascal. En Italie par exemple, il est connu sous le nom de triangle de Tartaglia qui l’étudia dès le xvie siècle. Mais c’est bien Blaise Pascal qui, en 1654, dans son traité entièrement consacré à ce triangle (Traité du triangle arithmétique), propose les premières démonstrations rigoureuses des propriétés de ce triangle et explicite son rapport avec les coefficients binomiaux et la formule du binôme. Ce qui fait l’intérêt de ce triangle, et qui lui donne une place de choix au sein des mathématiques, est le fait qu’il apparaît dans toutes les branches des mathématiques, notamment en algèbre, en analyse, en topologie, en combinatoire, en probabilités ou encore en statistiques, mais aussi en physique et en génétique.

CONSTRUCTION DU TRIANGLE DE PASCAL

Le triangle de Pascal est avant tout un tableau de nombres, un tableau triangulaire et infini. Par convention, les cases de ce tableau sont numérotées en partant de O du haut vers le bas et de la gauche vers la droite. On définit le contenu des cases de la manière suivante : la case (0,0) vaut 1 puis les autres cases sont obtenues en faisant la somme des deux cases immédiatement au-dessus à gauche et à droite. S’il n’y a pas de case à gauche ou à droite, sa valeur est considérée comme égale à zéro. Ainsi, les premières lignes du triangle de Pascal sont: 1 (ligne 1), 11 (ligne 2), 12 1 (ligne 3), 133 1 (ligne 4), 14 6 4 1 (ligne 5) et ainsi de suite. Dans le triangle de Pascal, les extrémités des lignes prennent toujours la valeur 1. Une première propriété intéressante est que la somme de chacune de ses lignes est une puissance de deux. La somme de la première ligne vaut 1 donc 2°, la somme de la deuxième est 2 donc 21, la somme de la troisième vaut 8 donc 23 et ainsi de suite.

COEFFICIENTS BINOMIAUX

Il existe une relation forte entre le triangle de Pascal et la notion de coefficient binomial. On rappelle qu’une combinai son est une façon de choisir un certain nombre d’éléments parmi un ensemble plus grand, autrement dit une combinai son est un sous-ensemble d’un ensemble fini. Ainsi, si on part d’un ensemble Ean éléments, on appelle k-combinaison un sous-ensemble de E comptant k éléments. Alors le nombre de k-combinaisons d’un ensemble donné possédant n éléments est noté Cń et est appelé coefficient binomial. Cette appellation vient du fait qu’il intervient dans le développe ment de la formule du binôme de Newton, fournissant une expression de (x+y)n. La formule de récurrence fondamentale, démontrée par Pascal, CK = CK-1 CK-1, avec les conventions CH=CH-1 et les coefficients binomiaux sont nuls si k est négatif ou k est supérieur à n, est alors une manière de construire le triangle de Pascal. C’est en réalité la manière qu’a utilisée Pascal pour le construire, la valeur de la case (n,k) étant exactement CK.

SUITE DE FIBONACCI

Le triangle de Pascal possède un grand nombre de propriétés « cachées » qui le relie à de nombreux outils mathématiques. On a vu précédemment qu’il était intrinsèquement lié à la formule du binôme de Newton, mais il est aussi lié à la suite de Fibonacci. Cette suite est composée des nombres de Fibonacci, sommes des deux termes précédents de la suite. On a alors la propriété suivante : la somme des diagonales sous-jacentes (ou ascendantes) du triangle de Pascal forme la suite de Fibonacci. Une autre propriété intéressante est fournie par les éléments centraux du triangle de Pascal, les éléments situés dans la colonne centrale du triangle. Ces nombres fournissent le nombre de combinaisons de n éléments parmi 2n. Divisés par n+1, on obtient alors ce que l’on appelle les nombres de Catalan. Ces nombres forment une suite d’entiers naturels utilisés notamment en combinatoire et qui permettent par exemple de calculer le nombre de manières d’arranger les parenthèses dans un calcul.

LES FRACTALES DE PASCAL

Dans un ouvrage consacré au triangle de Pascal, le mathématicien lan Stewart évoque ce qu’il appelle les fractales de Pascal. Ce sont simplement les propriétés du triangle étudiées à la loupe de la notion de congruence. En mathématiques, deux nombres a et b sont congrus modulo n s’ils ont le même reste lors de leur division euclidienne par n. On s’intéresse aux propriétés du triangle de Pascal modulo n. Il prend alors une allure fractale. Par exemple, on peut l’étudier modulo 2. Dans ce cas-là, on s’intéresse à la proportion dans le triangle de nombres pairs et impairs. On peut montrer qu’il y a 25% de nombres pairs et 75% de nombres impairs. En coloriant de deux couleurs différentes ces nombres, on obtient un nouvel objet qui n’est autre que le napperon fractal de Sierpiński. On l’obtient en effectuant la construction suivante : on part du triangle de Pascal, on l’évide au centre d’un triangle quatre fois plus petit, puis on répète ce procédé dans les nouveaux triangles obtenus.

EN RÉSUMÉ

L’origine du triangle de Pascal est bien antérieure aux travaux de Blaise Pascal. On lui donne toutefois son nom car il en démontra le premier les mystérieuses propriétés. Les valeurs apparaissant dans ce tableau de nombres sont intrinsèquement liées aux coefficients binomiaux du développement de la formule du binôme de Newton. Ce triangle, qu’on retrouve dans toutes les branches des mathématiques, possède de mystérieuses propriétés, comme ses liens avec les nombres de Fibonacci et ceux de Catalan, et d’étranges déclinaisons fractales.