Alors que les physiciens cherchent à rendre opératoire la réunion des forces fondamentales à l’échelle quantique, la théorie de supersymétrie pourrait s’avérer une piste de recherche nouvelle.

Au cours du 20e siècle, la physique a connu plus de bouleversements qu’à travers le reste de son histoire. Alors qu’il y a à peine cent ans, des physiciens comme Max Planck ne croyaient pas en l’existence de l’atome, le chemin parcouru par les « conquérants du minuscule » est époustouflant ! Nous avons réussi à comprendre que la force électromagnétique et l’interaction nucléaire faible, bien que tout à fait différentes, ne formaient qu’une seule et même force à l’origine. « Cette démarche unificatrice a pu être étendue, dans une certaine mesure, à l’interaction nucléaire forte, responsable de la cohésion des noyaux atomiques. Le résultat obtenu, qui permet de décrire trois des quatre forces fondamentales grâce à des principes mathématiques semblables, est d’une puissance considérable. Il constitue le modèle standard de la physique des particules » résume Étienne Klein. Mais malgré tous ces efforts, nous restons encore avec de bien fondamentales questions sur les bras. En effet, le modèle standard de la physique des particules a été très efficace pour prédire les constituants fondamentaux de la matière, que les expériences ont ensuite démontré. Mais les physiciens s’accordent à penser que ce modèle est incomplet.
LA QUESTION DE LA SUPERSYMÉTRIE
La supersymétrie est un prolongement du modèle standard qui vise à combler certaines de ses lacunes. « Soucieux d’élégance, des théoriciens ont poussé très loin l’idée de symétrie en jetant une espèce de “pont’’ entre la matière et ses interactions : ils se sont proposé de décrire les forces et les particules de façon similaire en suggérant qu’il existe une sorte de liaison secrète entre les particules de matière qui subissent les forces et celles – les ballons – qui les transmettent» précise le physicien. C’est le principe de la supersymétrie, mis sur pied dans les années 1 970, qui réclame une parité stricte entre les particules de matière et les particules d’interaction. « Celle-ci n’est possible qu’au prix d’une sorte de dédoublement de la matière : à chacune des particules déjà connues, la supersymétrie fait en effet correspondre une particule « partenaire supersymétrique ». A l’électron se voit ainsi associé un sélectron, au quark un squark, au photon un photino, et ainsi de suite. Comme on voit, cette opération a évidemment pour effet immédiat de doubler l’effectif total des particules élémentaires » poursuit Étienne Klein. D’une certaine manière, la supersymétrie propose de dépasser le modèle standard en franchissant une nouvelle étape sur la route de l’unification théorique des forces fondamentales. Pour autant, aucune preuve expérimentale n’a encore permis de démontrer la validité de cette thèse (aucun partenaire supersymétrique supposé n’a jusqu’ici été mis au jour). Cette théorie séduit beaucoup les physiciens, car l’hypothèse est très belle, mais cela n’est évidemment pas suffisant. Comment, dès lors, savoir si cette supersymétrie existe bien dans la nature ? « Il suffit, répond la théorie, d’accélérer des particules “normales » (par exemple des protons) jusqu’à ce que leur énergie soit si élevée que des particules supersymétriques pourront apparaître à l’issue de collisions très violentes. La théorie précise même que ces particules supersymétriques devraient apparaître par paires, puisque chacune d’elles devrait se désintégrer en une particule ordinaire et une autre particule supersymétrique. Mais à ce jour, aucune particule supersymétrique n’a été détectée. L’une d’elles pourra-t-elle être observée grâce au LHC dans les années qui viennent ? Si ce n’était pas le cas, un doute planerait sur
la justesse des principes sur lesquelles s’appuie la supersymétrie ». On pourrait légitimement se demander à quoi bon poursuivre dans cette voie alors que rien ne nous dit qu’elle soit viable. Mais de nombreuses théories prédisent que la particule supersymétrique la plus légère doit être stable et électriquement neutre, et qu’elle doit interagir faiblement avec les particules du modèle standard. Ce sont exactement les caractéristiques requises pour la matière noire, dont on pense qu’elle constitue l’essentiel de la matière présente dans l’Univers, et qui est censée faire tenir ensemble les galaxies. saviez-vous ? Tout l’intérêt de la théorie de la supersymétrie est venu de la stabilisation du boson de Higgs, permettant de créer une hiérarchie des masses des particules élémentaires. Chaque fermion est ainsi associé à un « super-partenaire » de spin entier, tandis que chaque boson est associé à un « superpartenaire » de spin demi- en Aller plus lois
ASTROPHYSIQUE ET PRÉJUGÉS…

Nous présupposons tous l’invariance des lois physiques ! Qu’est-ce que ça veut dire ? Que vous partez naturellement du principe que les lois physiques sont éternelles. Évidemment, c’est bien davantage le fait d’une absence de réflexion qu’une théorisation volontaire. Toujours est-il que, lors que vous vous levez le matin, et que votre four micro-ondes – dans lequel vous comptiez réchauffer votre café – ne s’allume pas, quel est votre premier réflexe ? « Zut, le micro-onde est cassé ». Vous ne vous dites pas : « Tiens, les équations de Maxwell sur l’électromagnétisme ont cessé d’être opératoires pendant la nuit », parce que vous supposez que les lois physiques ne sont pas en cause. De la même manière que, lorsque vous ne voyez qu’une partie d’un objet physique, vous lui attribuez spontanément des propriétés globales. D’où l’anecdote entre Wolfgang Pauli et Paul Dirac discutant dans le wagon d’un train. Lorsque Pauli dit à Dirac : « Ah, regardez : ce mouton a été fraîchement tondu ». Réponse de Dirac, dans la tradition sceptique : «Au moins de ce que côté ci ». La même méfiance devrait toujours s’appliquer à l’étude de notre Univers…
REPÈRES BIBLIOGRAPHIQUES
-> Baker Joanne, Juste assez d’astronomie pour briller en société, Éditions Dunod
-> Baker Joanne, 50 clefs pour comprendre la physique quantique, Éditions Dunod Klein Étienne, Les Secrets de la matière, Éditions Plon
CE QU’IL FAUT
RETENIR
LES PARTICULES ÉLÉMENTAIRES SONT LES PLUS PETITS OBJETS PHYSIQUES OBSERVÉS JUSQU’À PRÉSENT LE BOSON DE HIGGS A RÉVOLUTIONNÉ LE RAPPORT PHYSIQUE ENTRE MATIÈRE ET MASSE. LA SUPERSYMÉTRIE ATTEND ENCORE SAVALIDATION EXPÉRIMENTALE