La notion mathématique de fonction a ses limites en physique lorsque l’on veut calculer la valeur d’une fonction en un point, le « point physique » n’existant pas. C’est pour combler cette lacune des fonctions que la théorie des distributions a vu le jour dans la première moitié du XXe siècle.
LE PROBLÈME DE L’ÉVALUATION PONCTUELLE
La théorie des distributions trouve son origine dans la question délicate de l’évaluation d’une fonction en un point. Si, mathé matiquement, cette question trouve une réponse simple, elle n’a souvent aucun sens dans des situations concrètes, en physique par exemple. Si l’on considère l’exemple simple de la mesure de la température dans une pièce, on comprend bien que le thermomètre ne mesure pas la température en un point (le thermomètre occupe un ensemble de points physiques) mais une moyenne sur l’ensemble des points occupés par le thermomètre. C’est pour pallier ce défaut que la notion de distribution, une manière de généraliser celle de fonction, vit le jour dans la première moitié du XXe siècle sous l’impulsion de Paul Dirac ou Sergueï Sobolev. La théorie des distributions est aujourd’hui attribuée au mathématicien Laurent Schwartz, car ce dernier en donra la version la plus complète. Il fut d’ailleurs le premier mathématicien français à recevoir la médaille Fields pour ce travail.
IMAGINAIRE PUR ET AFFIXES
Tout élément z de C s’écrit de manière unique sous la forme z = a + ib, avec a et b réels. Le réel a s’appelle la « partie réelle » de z, et le réel b est la « partie imaginaire ». Notons que la partie imaginaire d’un nombre complexe est un nombre réel! Si un nombre complexe z s’écrit sous la forme z = b/, avec b réel, on dit que c’est un « imaginaire pur ». L’ensemble des imaginaires purs est noté /R. Un outil très utile pour manipuler les nombres complexes est la conjugaison. Si un nombre complexe s’écrit a + ib, son conjugué s’écrit a – ib. Des nombres complexes conjugués ont la même partie réelle mais des parties imaginaires opposées. De plus, un nombre complexe est réel s’il est égal à son conjugué.
Une manière usuelle de travailler avec les nombres complexes est de les représenter graphiquement. Pour cela, on associe à tout nombre complexe z = a + ib (a et b réels) le point M du plan de coordonnées (a, b). M
s’appelle l’« image » du nombre complexe z, alors que z est appelée l’« affixe » du point M.
MODULES ET ARGUMENTS
Une autre représentation très utile des nombres complexes consiste à introduire les modules et les arguments. Le module d’un nombre complexe est la distance qui sépare le point O (centre du repère) du point M, image du nombre complexe (ce module est égal à la racine carrée de a2 + b2). Toujours dans cette représentation graphique, un argument d’un nombre complexe est la mesure de l’angle formé par l’axe des abscisses et le vecteur OM. Il faut bien prendre garde au fait qu’un nombre complexe possède une infinité d’argu¬ ments, puisqu’on peut ajouter autant de fois 2 n que l’on veut, cela reste toujours un argument de ce nombre complexe (on ne fait qu’ajouter des tours complets du cercle). Une fois muni de ces outils, on peut écrire un nombre complexe sous plusieurs formes. Comme on l’a vu précédemment, il peut s’écrire z = a + ib avec a et b réels (forme algébrique), mais il peut également se noter z = r cos (9) + r sin (0), où r est le module de z et 0 un argument (forme trigonométrique).
LES OPÉRATIONS ARITHMÉTIQUES
De manière concomitante à la naissance des nombres complexes, les mathématiciens entreprennent de mettre un peu d’ordre dans la théorie des fonctions. L’analyse réelle (au sens où l’on travaille dans l’ensemble des réels) naît ainsi à cette époque avec la mise en évidence de la possibilité de représenter les fonctions usuelles (polynômes, logarithme, exponentielle, etc.) par la somme de séries convergentes, lesquelles se prêtent de manière uniforme aux opérations arithmétiques. On appelle de telles fonctions des « fonctions analytiques », outils aux propriétés extraordinaires. Mais beaucoup de fonctions réelles n’entrent pas dans ce cadre et se trouvent être beaucoup moins régulières, ce qui les rend moins utilisables. Les singularités (fonctions seule¬ ment continues, voire discontinues) de la théorie des fonctions analytiques réelles vont disparaître lorsque les mathémati¬ ciens auront l’idée de passer dans le plan complexe. L’analyse complexe, incroyablement puissante, est née.
LA FONCTION HOLOMORPHE
Trois idées fondamentales peuvent expliquer l’universalité du passage de l’analyse réelle à l’analyse complexe. D’une part, le théorème fondamental de l’algèbre conduit à ce que l’on appelle la « clôture algébrique » de C (tout polynôme de degré n à variables dans C a exactement n racines dans C). D’autre part, C est la seule extension de R préservant les propriétés algébriques (Frobenius), si bien que l’étude des fonctions complexes doit nécessairement constituer l’exten¬ sion naturelle pour l’étude des fonctions réelles. Enfin, l’idée de travailler dans le plan complexe a jeté pour la première fois un pont entre géométrie et théorie des fonctions.
L’élément clé de l’analyse complexe est la notion de fonction holomorphe. Une telle fonction est une fonction complexe dérivable au sens complexe. La grande surprise viendra du fait que toute fonction holomorphe est en réalité analytique. L’analyse complexe est ainsi devenue naturellement un des champs les plus actifs de la recherche mathématique.
EN RÉSUMÉ
L’ensemble des nombres complexes a vu le jour pour pallier un défaut des réels, l’impossibilité de résoudre des équations du type x2 = – 1. L’élément central de ce nouvel ensemble de nombres est le nombre i, qui est tel que i2 = – 1 (/ pour « imaginaire »). On peut écrire un nombre complexe sous forme algébrique (parties imaginaire et réelle) ou sous forme trigonométrique (module et argument). Ces nombres ont montré au fil du temps leurs extraordinaires propriétés, notamment en analyse complexe.